Nicolas Bouvier dans Il faudra repartir, Voyages inédits :
« Médina. Pas le sens géographique ; une ignorance, un à-peu-près quant à la forme du monde qui correspond d’ailleurs au stade artisanal dans lequel ils excellent. »
Moouaaaisss… Je ne partage pas tout à fait le point de vue de Nicolas Bouvier sur la géographie des médinas. Certes, leur configuration ne semble pas être rationalisée, aurait été sans doute un cauchemar pour un esprit très cartésien et certaines d’entre elles sont le foyer de mes trouvailles artisanales (et notamment de ma première escale à découvrir ici).
La médina n’aurait donc « pas le sens géographique ». Non, elle est mieux que cela, puisqu’elle reprend à son compte le rond terrestre. Ses rues ont quelque chose de la matrice. Tout semble y être approximation, déformations parfaites, sinuosités bienveillantes. Ses ‘derb’ – comprenez, ses rues en arabe – arrondis semblent être des vallonnements sensuels. Comme si les hommes avaient réussi à hisser l’art du bâti au même rang que l’œuvre spontanée et touffue de la nature. La médina est cocon, enchevêtrement, termitière aux dimensions titanesques et à la collectivité forcée. Sa géométrie n’est pas cassante. Elle est à la fois douce et sauvage, cérébrale et circulatoire, synapses et vaisseaux sanguins. Silhouette invertébrée et joviale. Commissures et lignes brisées. Une vielle ville aux contours branlants dont l’anatomie est un écho étrange aux courbes humaines. Pour peu que ses murs soient encore en pisé, on la sent respirer.
Cette hérésie architecturale, ce cauchemar haussmannien est mon fantasme citadin. Que cela plaise ou non au fantôme de M. Bouvier ! C’est aussi le lieu où je suis tombée en amour pour certains objets que vous trouvez et trouverez sur www.100escales.com. Au détour de certaines de ses ruelles, de certaines de ses habitations, j’ai même fait des rencontres qui se sont insinuées pour un bon bout de temps dans les recoins de mon cortex. Vous pouvez d’ailleurs (re)lire des portraits tout droit venus des rencontres hasardeuses de la médina sur mon Journal de bord.
Et pour vous, la médina, cela évoque quoi ?
Texte & photos 100 escales – E.K.
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